mardi 6 mars 2007

Sonate de Scarlatti

Pour quelqu'un comme moi qui, jamais au grand jamais, n'est parvenu à apprendre le solfège et qui, à son grand désespoir, ne possède aucun sens du rythme, la musique est un des arts qui me fait la plus grande impression.

Enfant, je me souviens d'un air de Tchaïkovsky que je chantais comme une ritournelle magique.

J'ai parfois des transports d'émotion qui me viennent du plus profond et que je voudrais partager avec chacun.

C'est ici le cas des sonates pour piano de Scarlatti.

Je les ai découvertes en lisant, oui en lisant, le roman de Denis Tillinac "Je nous revois..." (Gallimard). Les sonates y jouent un rôle essentiel à l'alchimie des amours qui unissent deux personnages. Elles y sont comme des baisers et des étreintes.

Finalement, je ne savais que peu de choses de Scarlatti. Sinon la vague connaissance d'un compositeur virtuose du début du XVIIIème siècle ayant laissé un fabuleux héritage de plus de cinq cents pièces aux pianistes et clavecinistes.

Je me précipitais donc chez mon disquaire et m'abandonnais au sort qui offrait à ma passion naissante une sélection de dix-huit sonates, interprétées par Marcela Roggeri et enregistrées en concert en juillet 2005 au Manège de Reims, dans le cadre des Flâneries musicales d'été de Reims.

J'aime par dessus tout, dans ce disque, dont je ne puis quasiment plus me passer, la sonate en si mineur, K27.

Trois minutes et cinquante deux secondes d'absolu intense, de communion avec l'infini. La montée de l'intensité du plaisir se fait par vagues, comme si trois mains, non pas deux, non pas quatre, comme si trois mains s'enhardissaient en diableries sur le rachis du clavier. La montée du plaisir relâche sa pression pour mieux me ressaisir, pour achever de s'emparer de moi.

J'aime imaginer la pianiste arc-boutée sur son instrument, comme lui faisant l'amour. Au terme de cette folle et brève cavalcade, la retombée, apaisée et apaisante, l'abandon des sens après qu'ils eussent exulté. Un désir d'abandon, oui d'abandon, et d'enfouissement aussi.

Scarlatti, comme tous les grands passeurs d'émotions, me révèle à moi-même et me redonne le courage de reprendre d'une plume tremblante ce désir imbécile et fou, de présomptueux et d'agité : écrire.

Laissons aller les choses. Scarlatti. Trois minutes et cinquante deux secondes d'absolu pour une vie révélée à elle-même.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Bonjour,

L'univers des autoroutes de l'information a conduit mes lectures jusqu'à votre "interprétation" de Scarlatti.
Même si vous ne pensez pas avoir le sens du rythme, vous semblez avoir l'émotion musicale et votre texte est en quelque sorte une composition à travers l'écriture des mots...
Françoise B
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