jeudi 15 mars 2007

Jacques Chirac tire sa révérence

Jacques Chirac tire donc sa révérence. Il le fait d’une façon digne, à la hauteur de la fonction qu’il occupe depuis douze ans. Certes, on serait tenté de dire qu’il est plus à son aise dans les discours de circonstance que dans la gestion et l’action quotidiennes. Mais on ne lui enlèvera pas qu’il tire sa révérence avec ce qu’il faut d’émotion pour gagner les cœurs de ses concitoyens. Il faut dire qu’il est tout à fait à son aise dans l’empathie. Mais, basta, soyons fair-play ! C’est un redoutable animal politique qui raccroche les crampons au terme de quatre décennies d’action politique acharnée, combative, avec ce que Valéry Giscard d’Estaing appelle méchamment un instinct « famélique » tant l’appétit de pouvoir, de bonne chère et de chair fraîche a été démesuré chez cet ogre de Chirac. Laissons le bilan aux historiens, c’est leur affaire ; c’est un destin hors du commun qui tire à sa fin. Son intervention solennelle, dimanche soir, avait quelque chose de touchant et de nostalgique. C’était le testament politique qu’un homme du XXème siècle laissait à la France du XXIème siècle.

Songeons un peu : quand Jacques Chirac a été élu, pour la première fois, député de la Corrèze, le Général de Gaulle était à l’Elysée, Mai 68 n’avait pas eu lieu, la deuxième chaîne de la RTF (on ne disait pas encore l’ORTF) venait à peine d’allumer sa lanterne magique en noir et blanc, la CEE ne comptait que six membres (les fondateurs), Leonid Brejnev n’était au pouvoir que depuis trois ans, Ceausescu y accédait à peine à Bucarest, Lindon Johnson était président des Etats-Unis, la loi Neuwirth autorisait en France la contraception, la Guerre des Six-Jours enflammait le Proche-Orient, les Beatles chantaient « All you need is love », les Doors et les Pink Floyds sortaient leurs premiers albums (en vinyle micro-sillon, de l’hébreu pour les moins de 20 ans d’aujourd’hui), Catherine Deneuve et Françoise Dorléac chantaient des refrains de Michel Legrand dans les « Parapluies de Cherbourg » de Jacques Demy,… Je m’arrête là ; la France est un pays formidable où il est permis de s’étonner du retrait de la vie publique d’un homme qui y entra en 1967 !

Maintenant, il ne reste plus qu’à lui choisir un successeur. En début de semaine, le Conseil constitutionnel publiera la liste des candidats aptes à concourir, c’est à dire ayant rassemblé un nombre suffisant de parrainages d’élus. Quel que soit leur nombre exact, seuls trois d’entre eux peuvent l’emporter. Alors les Français devront choisir et gageons qu’ils inclineront, in fine, même après avoir joué à se faire peur, vers celui qui leur paraîtra le plus apte à exercer la fonction suprême de la République. Le choix d’un président relève d’autres critères que ceux de la Star Academy. La mièvrerie de Ségolène Royal, le « ni-nisme » lénifiant de François Bayrou devront beaucoup moins peser dans la balance que la détermination et l’autorité de Nicolas Sarkozy. Dans un monde complexe, dangereux et en pleine mutation, on n’a besoin ni de la pommade socialiste ni du cataplasme centriste. : ce sont des vitamines qui nous sont nécessaires.

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