Mario Vargas Llosa est péruvien et immensément célébré dans le monde. Qu’il ait fait de la politique dans son pays n’est rien à côté de l’œuvre immense et universelle de cet écrivain de génie, une des grandes figures de la littérature sud-américaine. L’auteur de l’ « Eloge de la marâtre », des « Cahiers de Don Rigoberto » ou de « La fête au bouc » a publie en 2006 chez Gallimard son dernier roman, traduit en français par Albert Bensoussan.
Ces « Tours et détours de la vilaine fille » sont le récit enlevé, d’une puissance narrative éblouissante, d’une très belle histoire d’amour, comme seule peut en imaginer une personnalité aussi riche que celle de Vargas Llosa et comme seule peut en donner la foisonnante culture latino-américaine, avec ses excès, sa passion et son extravagance. « Tours et détours de la vilaine fille » est aussi une preuve magnifique de ce que l’ouverture au monde peut offrir comme perspectives à la littérature. Ce livre est planétaire et cosmopolite, sans rien renier de ses origines péruviennes, et il nous emmène, à un train d’enfer, de Lima à Madrid, en passant par Paris, Cuba, Londres ou Tokyo.
La « niña mala » (la vilaine fille) dont on ne connaît le véritable nom qu’à la fin de l’histoire (encore que…), va faire endurer à son amoureux une vie de soucis et de chagrins d’amour. Aventurière, égoïste, perverse, elle se joue du « bon garçon » Ricardo comme d’un pion et, lui, demeure transi, toujours prêt à lui venir en aide et à lui débiner des « cucuteries » un peu guimauve, entre abandons, trahisons et retrouvailles incroyables. Vargas Llosa démontre ici combien la question de la vraisemblance et secondaire en littérature, même dans une œuvre ayant pour cadre l’histoire de la deuxième moitié du XXème siècle, celle que l’auteur a vécue aux avant-postes.
Sitôt son diplôme d’avocat en poche, le « bon garçon » débarque à Paris dans les années 50, un rêve d’enfance, et y devient traducteur à l’UNESCO. Son premier ami, un compatriote, l’entraîne dans un réseau clandestin pour combattants de la révolution cubaine. C’est ainsi qu’il retrouve un amour de jeunesse, la « vilaine fille ». Comme les chats, la « vilaine fille » a au moins neuf vies : fausse adolescente chilienne au Pérou, guérillera castriste à Paris et Cuba, femme de diplomate en France, aristocrate en Angleterre, maîtresse d’un yakusa au Japon. Le lecteur s’essouffle sans se lasser à la suivre et à suivre Ricardo dans leurs pérégrinations qui le trimbalent de Miraflores, quartier liméen de la jeunesse dorée, au Paris des existentialistes, au « swinging London » des hippies et encore ailleurs, au Madrid de la movida et de la renaissance culturelle.
Souvent tragi-comique, sensuel et émouvant, ce livre se lit presque d’une traite et laisse une formidable impression de bonheur comme seule la littérature en offre. Laissez-vous tenter.
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