jeudi 10 mai 2007

La fin de l'exception française


La fin de l’exception française ? Oui, par l’ouverture d’un cycle au cours duquel plus rien ne sera comme avant dans la France politique.

Cela a commencé par une campagne électorale hors normes au cours de laquelle se sont affrontés trois dynamiteurs. Chacun dans son genre, Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal et François Bayrou ont placé au premier rang une génération, une volonté de renouvellement, un désir de rupture. Et ils ont été entendus par les Français. A eux trois, ils ont rassemblé plus des trois quarts des suffrages exprimés au premier tour. La logique a voulu que ce soit le plus préparé, le plus déterminé, le plus organisé et le plus transparent des trois qui l’emporte. Nicolas Sarkozy avait rassemblé toutes les droites, bâti un projet et annoncé ses intentions avec une force de conviction qui ne pouvait que balayer tout sur son passage. Pour autant, que ce soient les deux autres candidats qui lui aient disputé la vedette n’est pas sans importance pour la suite.

Cette campagne a également été celle au cours de laquelle, depuis 1965, les médias – pour des raisons évidentes de progrès technologiques – ont tenu la place la plus importante mais aussi la plus stimulante. En effet, l’irruption d’Internet et des nouvelles chaînes de télévision a pesé dans le débat. Chacun se souvient de la vidéo pirate sur « dailymotion » dévoilant les propos de Ségolène Royal sur les enseignants qui ne travaillent pas assez, ou celle révélant qu’Alain Duhamel souhaitait apporter son suffrage à François Bayrou. De même, les débats internes au Parti socialiste sur « La chaîne parlementaire » ou le débat Royal/Bayrou sur BFM TV auront placé ces deux « petites » au rang des plus « grandes ».



Plus largement, la victoire, dans des proportions incontestables, de Nicolas Sarkozy place notre pays dans le droit commun des démocraties occidentales. Par le style d’abord. Le nouveau président de la République va imposer une pratique de la fonction sur laquelle son successeur, dans cinq ou dix ans, ne pourra pas revenir. Moderne, présente, active, décomplexée, la méthode Sarkozy sera probablement assez « décoiffante ». Par le fond, ensuite. En ayant voté massivement aux deux tours pour un candidat s’affichant clairement à droite, levant tous les tabous de la pensée unique, se réclamant de l’ordre, de la morale, de l’autorité, de la réussite par le travail, prônant le service minimum dans les transports, la baisse des prélèvements obligatoires, le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, ne reniant pas sa sympathie pour les Etats-Unis et Israël, les Français ont peut-être enfin accepté de se donner la chance de vivre ce que Ronald Reagan, Margaret Thatcher, José-Maria Aznar ou Silvio Berlusconi ont fait connaître à leurs nations au cours des vingt-cinq dernières années.

Face à ce vent du changement, l’opposition va devoir s’adapter et rompre définitivement avec les vieilles lunes de son passé marxiste. Le Parti socialiste, bon gré mal gré, va devenir social-démocrate et les centristes, à l’instar des radicaux il y a trente ans, vont se scinder entre « Mouvement démocrate » dont le cœur penche au centre-gauche et « UDF canal historique » dont le cœur penche au centre-droit. De part et d’autre de ces deux blocs, l’un conservateur libéral, l’autre social-démocrate, les extrêmes sont marginalisés. C’est peut-être cela la fin de l’exception française.

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