samedi 7 avril 2007

L'idée de nation n'est pas une régression

L’idée nationale est donc, en cette presque fin de campagne électorale, le nouveau thème central de tous les débats. Il aura suffi que Nicolas Sarkozy formule la proposition de créer un « Ministère de l’Immigration et de l’Identité Nationale » pour que tout s’embrase comme de l’étoupe. Après avoir trouvé l’idée « ignoble », Marie-Ségolène Royal s’en est emparée et revendique sa part d’identité nationale en contraignant l’assistance des meetings socialistes à entonner « La Marseillaise » et en formant le vœu que chaque famille française possède par-devers elle les couleurs nationales et que chaque jeune ait, à un moment ou un autre de sa scolarité, l’heur de participer à un atelier de couture pour confectionner un drapeau tricolore.

Mais au-delà de tout cela, il convient de relever que l’idée de nation revient sans tabou sur toutes les lèvres. Il n’y a, finalement, que François Bayrou et la kyrielle des candidats d’extrême gauche, pour trouver à y redire. Les autres, de Royal à Le Pen, en passant par Sarkozy et Villiers, n’ont plus aucune crainte avec ce thème. Un observateur étranger pourrait s’en étonner, tant il est évident partout ailleurs que la patriotisme et l’attachement à la nation vont de pair avec l’engagement public et, même, avec le sentiment d’appartenance à son pays.

Il faut dire que la France revient de loin. Notre pays a vécu trop longtemps sous la domination idéologique marxiste, donc internationaliste. La droite française, ne s’avouant d’ailleurs que du centre-droit, s’est réfugiée sous la bannière étoilée de l’Europe. De plus, il y a en France un trouble conceptuel qui voit se mélanger dans la logorrhée des savants les notions de nation, de république et de démocratie.

Si l’on s’en tient à Ernest Renan, dans son discours à la Sorbonne "Qu'est-ce qu'une nation ?", en 1882 : « Une nation est donc une grande solidarité[...]. Elle suppose un passé ; elle se résume pourtant dans le présent par un fait tangible : le consentement, le désir clairement exprimé de continuer la vie commune [...] un plébiscite de tous les jours.».

La république, elle, est le régime de gouvernement d'un État ou d'un pays où la souveraineté procède du consentement populaire. Mais la république n'implique pas forcément une démocratie. N’allons pas au fond d’un débat où se plaisent les politologues mais convenons que nos élites, dans leurs discours et leurs postures, ont un peu tendance à diaboliser la nation, à déifier la république pour, au final, oublier toute référence à la démocratie.

Dans ce galimatias, j’aurais, pour ma part, tendance à préférer la nation à la république, et à sublimer par dessus tout la démocratie.

Oserais-je écrire que c’est à mon sens le fondement de toute idée libérale ? La démocratie libérale suppose l’égalité de tous les citoyens, le suffrage universel, la séparation des pouvoirs et le primat de la représentation parlementaire. Que le régime soit républicain ou monarchique n’enlève rien ni n’ajoute rien. On peut être aussi libre en France, aux Etats-Unis qu’au Royaume Uni ou en Espagne.

Mais la démocratie nécessite, pour bien s’entendre, un cadre national. Il n’est qu’à voir la résurgence de l’idée nationale dans les nouvelles démocraties d’Europe centrale et de l’est, libérées du joug totalitaire communiste pour s’en convaincre. Non, l’idée de nation n’est pas une régression ; elle est une des conditions de l’existence de la forme démocratique d’organisation du pouvoir. Ce « consentement, le désir clairement exprimé de continuer la vie commune » doit être partagé pour que le projet national ne soit pas mis à mal. Les immigrants doivent consentir à ce projet avant d’intégrer la communauté nationale.

C’est ainsi que je comprends la proposition de Nicolas Sarkozy et que je ne conçois pas qu’elle choque. Sauf à remettre en cause l’idée même de nation française.

Aucun commentaire: