vendredi 27 avril 2007

La stratégie de Bayrou

François Bayrou est entré en campagne électorale. Le propos peut paraître singulier ou vous donner à penser que je viens d’adresser à La Montagne un billet rédigé six mois avant ce jour. Non, je n’ai pas de retard, François Bayrou est en avance sur ses interlocuteurs. La présidentielle de 2007, et pour cause, il en a déjà fait le deuil. Je le crois même plutôt résigné à une élection de Nicolas Sarkozy. Quelle est donc sa stratégie ? Quels buts poursuit-il ?
Avant même que les sondages ne lui laissent entrevoir des espoirs irraisonnables, le président de l’UDF avait une stratégie bien arrêtée qu’il confiait aux journalistes : après un score médiocre en 2002, il ambitionnait un score à « deux chiffres » en 2007 pour, enfin, l’emporter au terme de sa troisième candidature en 2012, à l’instar des deux présidents dont il se sent l’égal : Mitterrand et Chirac.

Le résultat du premier tour de 2007, à la lumière de cet objectif, va au-delà de toutes ses espérances. Mais il lui faut désormais faire fructifier son petit capital. Comment compte-t-il s’y prendre ?

Le Parti Démocrate, fruit de la mue de l’UDF, a pour ambition d’être le seul opposant politique et parlementaire à la majorité présidentielle de Nicolas Sarkozy afin de placer son président François Bayrou en position de premier challenger dans cinq ans. Pour cela, il doit flirter avec Ségolène Royal. Mais attention, chez ce séducteur (dont André Labarrère disait qu’il s’entendait bien avec lui car l’un draguait les femmes pendant que l’autre regardait leurs maris), le jeu est subtil. Il doit susciter un désir d’union avec Ségolène Royal sans que celle-ci soit consommée. Car, en effet, une élection de Ségolène Royal ruinerait ses propres désirs d’avenir. L’échec de cette amourette doit apparaître suffisamment aux torts de la dame pour que ses amis sociaux-démocrates lui en tiennent grief et se donnent à Bayrou. Car ce sont ces ralliements-là que vise la député béarnais.

L’élection de Nicolas Sarkozy, prophétise-t-il apparemment, causera une implosion du Parti socialiste et une recomposition de la gauche non marxiste dont il sera non un supplétif mais le leader incontesté.

Hélas pour lui, il se trouve à la tête d’une formation qui est, à bien des égards, l’héritière du MRP de la IVème République : elle a autant d’électeurs de droite que de gauche et des adversaires de tous les bords. Le MRP n’y a pas survécu. Le Parti Démocrate saura-t-il mieux faire ?

D’ici là, deux écueils majeurs menacent la fragile embarcation de François Bayrou. D’une part, sa base parlementaire regimbe et n’oublie pas qu’elle doit ses quelques trente sièges de députés à l’électorat de droite et à la bienveillance de l’UMP. D’autre part, le Parti socialiste ne cèdera au Parti Démocrate des circonscriptions que si Ségolène Royal lui doit son élection. Or, de cette élection-là, Monsieur Bayrou n’en veut pas.

« Dérisoire !», commente Nicolas Sarkozy qui continue, après avoir rassemblé sur son nom le plus grand nombre de voix depuis que le président de la République est élu au suffrage universel, semble continuer à recueillir la faveur de l’opinion qui apprécie sa stature d’homme d’Etat, son programme, sa volonté et sa constance.

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