mercredi 6 février 2008

De Pompidou à Attali

Chronique publiée dans La Montagne du 25 janvier 2008

La séquence jet-set, un brin vulgaire et assurément de très mauvais aloi, est maintenant derrière nous, semble-t-il. L’alerte est sévère et la sanction des sondages de popularité n’a pas tardé à tomber. Nos concitoyens apprécient l’allant et la détermination de Nicolas Sarkozy à faire bouger les choses. Ils ne sont point rebutés par son hyper-activité à condition que celle-ci leur donne l’impression d’être dédiée à la résolution de leurs problèmes. Car ceux-ci, et ceux de la France dans la même occasion, sont pléthore. La sorte de krach boursier qui s’est abattue sur l’ensemble des places financières de la planète apporte, si besoin était, une nouvelle touche sombre à un tableau d’ensemble de l’économie qui ne porte guère à sourire.

Dans ce contexte, les Français, qui ne sont point aussi sots que certains le pensent, ont parfaitement compris que, premièrement, nous entrons dans une nouvelle phase de crise économique et que, deuxièmement, l’Etat français étant en situation de quasi-faillite, les recettes d’autrefois (le recours à l’Etat-providence) ne sont plus envisageables. Alors, ils veulent un président de crise. Ils aspirent à voir un chef de l’exécutif aux manettes, au four et au moulin, la sueur au front, les manches retroussées. La bimbo et les lunettes d’aviateur font mauvais genre à leurs yeux et ils leur préfèrent soudain le style «vieille école », très orléaniste, de François Fillon. Et ce n’est que justice !




Le Premier ministre donne au pays l’image rassurante et crédible d’un homme de terroir, compétent, intègre, volontaire et déterminé à changer les choses. A la fois pragmatique et réformateur, conservateur et moderne, François Fillon, fors la ressemblance physique, pourrait tenir en France la position qu’y occupa naguère Georges Pompidou.




Mais Nicolas Sarkozy a de la ressource et il n’a pas manqué de se ressaisir dès qu’il a reçu le message de l’opinion publique, relayée par les élus de sa majorité. Dans ses vœux au corps diplomatique, il a déclaré qu’il « n’[a] pas été élu pour [s]’incliner devant des fatalités. Du reste, je ne crois pas à la fatalité. J’ai été élu pour créer des opportunités, pour changer la France à travers un processus continu de réformes profondes. »

Le rapport de la Commission Attali qui vient de lui être remis lui donne une bonne occasion d’illustrer cette volonté. Etait-il maladroit de confier la présidence de cette commission à l’ancien conseiller spécial de François Mitterrand ? Je crois la manœuvre au contraire plutôt habile. En effet, dans ce bon vieux pays de France, il vaut mieux faire endosser les idées libérales à des gens de gauche pour les rendre acceptables. Certes, Jacques Attali ne peut résister à quelques carabistouilles un brin provocatrices à l’égard des élus (la suppression des départements) ou de l’opinion (l’ouverture des vannes de l’immigration). En revanche, les propositions dont il se fait l’interprète relèvent du bon sens pour la plupart et nécessiteront courage et détermination lors de leur mise en œuvre.




Mais, dans une démocratie, le pouvoir ne saurait appartenir aux experts. C’est donc au gouvernement et au Parlement qu’il revient de séparer le bon grain de l’ivraie. Ce rapport offre une opportunité considérable de lancer des réformes en profondeur et aux partis de la majorité comme de l’opposition de prendre leurs responsabilités. Tout faire sans discernement relèverait de la maladresse. Ne rien faire, à contrario, serait une faute. De même que c’est au pied du mur que l’on reconnaît le maçon, c’est au pied de la réforme que l’on reconnaîtra le président réformateur. A lui de jouer maintenant. Flanqué de François Fillon, il ne peut espérer meilleure compagnie pour relever ce défi.

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