vendredi 24 août 2007

Philippe Raynaud : "Qu'est-ce que le libéralisme ?" (1ère partie)

L’été s’achève dans les frimas, au moins dans nos Pyrénées, et déjà apparaissent les grands débats qui seront ceux de la rentrée politique, économique et sociale en France, sur fond de persistance de la crise économique, rendue plus perceptible par la crise que traversent les marchés financiers avec les fameux « subprime ». Le moment est venu de nous attarder sur une des caractéristiques les plus saisissantes de la société française et qui permet de cerner les raisons de sa difficulté à entrer autrement qu’à reculons dans la modernité. La France est la seule nation démocratique où « libéral » est une insulte.

Dans son numéro daté de cet été (n°118), la revue « Commentaire » publie un très intéressant article de Philippe Raynaud, « Qu’est-ce que le libéralisme ? ».




Professeur de science politique à l’université Panthéon-Assas, auteur de nombreux essais et publications de philosophie et de théorie politiques, Philippe Raynaud pose de façon passionnante la « question libérale » en France. Son raisonnement part de ce paradoxe qui pourrait sembler cocasse : « La France a ceci de curieux que, alors qu’elle est probablement, dans le monde développé et démocratique, un des pays dont la politique économique est l’une des moins libérales, beaucoup de Français croient vivre sous une forme de dictature libérale. »

Mais au fond, sait-on de quoi on parle ? Comment ne pas être agacé par ces « antilibéraux » et autres « altermondialistes » qui, orphelins des pseudo-« démocraties populaires » communistes, vouent aux gémonies la « démocratie libérale », s’appuyant sur une dénonciation de la pénétration supposée des idées néo-conservatrices américaines en France ?

Il faut lire le texte de Philippe Raynaud pour bien comprendre ce qu’est le libéralisme et mesurer l’ineptie que constitue son rejet viscéral dans le pays de Montesquieu, Constant et Tocqueville. Cela est d’autant plus surprenant qu’à bien y réfléchir, rappelle l’auteur, « certaines idées libérales ont fini par progresser dans la classe politique, et même dans la majorité de la population ; personne ne conteste sérieusement l’idée de la séparation des pouvoirs, tout le monde demande une certaine indépendance de la justice et le constitutionnalisme, c’est à dire le fait que le législateur soit l’objet d’un contrôle qui vérifie la conformité des lois avec la Constitution, est maintenant très largement admis, même à gauche. [N. de l’A. : la saisine régulière du conseil constitutionnel par les députés socialistes est une pratique libérale qu’ils n’avouent pas. L’hommage du vice à la vertu ?] Même dans la sphère économique, certaines idées libérales ont progressé : peu de gens, en dehors d’Olivier Besancenot, demandent la fin de l’économie de marché et la plupart des gouvernements (même et surtout de gauche) ont accompli des privatisations. » Paraphrasant la pensée marxiste, Philippe Raynaud moque cette « fausse conscience » qu’il appelle mauvaise foi et qui voit la société française, et notamment politique, prendre acte de transformations libérales, voire y concourir, en refusant l’idée même de libéralisme.

Dans son texte, pédagogique et accessible, le politologue définit les traits permanents du libéralisme : le droit des individus, la séparation des pouvoirs et l’autonomie de la société, d’où découle la théorie économique classique. (à suivre)

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